La tendance de la rentrée littéraire est à l’épistolaire. J’ai cherché une rime en -ard pour le titre de ce billet, mais force est de constater qu’aucun qualificatif n’a trouvé ma faveur. Aussi le minimalisme, par définition non inclusif, a-t-il supplanté la tentation du buzz furtif.
Me voilà donc, studieuse, installée à la salle d’étude de la bibliothèque municipale de mon quartier, la démarche sonnant le glas des estivales frivolités, la carte de bibliothèque sépia supplantant celle de Séphora. Les 30 degrés du lieu, austère à souhait mais non climatisé, ne me décourageront pas. Ma rentrée littéraire se veut presque sérieuse, ou pour le moins studieuse. Et le silence des bibliothèques est d’or. La faute à mes lectures d’été, Michon, Pasolini, Balzac. Les « Illusions perdues » de Balzac m’ont fait retrouver les miennes ! Enthousiasmée par Lucien, le Cénacle et la bande à Étienne Lousteau, je ne prends même pas parti. J’étais bien avec tous, j’avais envie d’écrire et l’insoutenable légèreté de l’être ne m’est plus si insoutenable que cela depuis que ma frise temporelle me rappelle l’inéluctable finitude dudit être.
Cependant, pour qui n’a pas lu le roman ou vu le film sorti l’an dernier, sachez que l’action se déroule dans l’effervescente vie artistique parisienne et surtout dans un système économique cynique où tout s’achète et se vend, y compris la critique. Les uns encensent, les autres fustigent ! Que croire de la critique ? Mais il s’agit d’une fiction n’est-ce pas ? Je n’ai pu m’empêcher d’ironiser après la lecture de deux critiques littéraires du roman de Virginie Despentes « Cher connard » qui, comme vous l’aurez relevé, est la tête d’affiche de cette rentrée. Télérama encense, Transfuge fustige ! Diantre, on se croirait dans la Comédie humaine ! Mais après vérification, aucune des deux critiques n’était signée Lucien de Rubempré !
Que croire de la critique et pire encore, que lire après avoir achevé ce chef d’œuvre balzacien ? Ma rentrée littéraire ne sera pas des plus confortables, mon niveau d’exigence étant à son maximum, le maximum des uns pouvant être le minimum des autres, j’en conviens. Mais quitte à ne pas trouver profusion d’œuvres littéraires dans ce millésime, j’ai pris l’option de rester dans le thème des illusions perdues et ouvre mon bal préféré de la saison automnale par un roman dont je n’attends pas qu’il soit littéraire ou qu’il prétende l’être : « Où es-tu monde admirable ? » de Sally Rooney, autrice étiquetée malgré elle romancière des millenials par la presse. Je m’offre donc un stage non-rémunéré dans la vie ordinaire des trentenaires désenchantés, en Irlande. Et telle l’une des narratrices du roman, en cette fin d’été des plus sèches, je me demande si notre civilisation ne va pas s’effondrer tout comme l’Âge du Bronze.
Sally Rooney, malgré son étiquette marketing génération Snapchat m’offre un très plaisant début de rentrée littéraire. Certes dans son roman, l’angoisse climatique côtoie les limites du capitalisme. Mais c’est une cérébrale et en ce sens, elle colle parfaitement à mon humeur et me conforte dans l’idée que dans les prochaines semaines, je serai bien mieux installée à la bibliothèque, écrivant ou lisant, plutôt qu’à tenter de dynamiter les nouveaux algorithmes des réseaux sociaux ! Tout n’est pas perdu dans ce monde admirable, n’est-ce pas ?
Alors admirable lecteur ? Avez-vous dégoté une rime en -ard qui aurait l’élégance des salons balzaciens ?
Je vous suggérerais un snobinoche mignard.
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Suggestion pertinente !
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