À la librairie Les Furtifs, on écrit !

Il n’y a que deux ou trois motifs que je considère comme valables et motivants pour être matinale le week-end. Un train pour Paris, un billet pour une expo ou un atelier d’écriture. Ce samedi matin, le réveil a sonné, j’ai trainé un peu, le chignon flou s’est substitué au shampoing/lissage qui aurait dû prévaloir, je ne trouvais plus mon stylo Bic quatre couleurs fétiche et il a fallu camoufler des imperfections sur le visage fatigué. Make-up little Susie, Make-up !

J’ai rendez-vous à la libraire Les Furtifs pour un atelier d’écriture animé par Hélèna Villovitch, intitulé « Nouvelles en 3 lignes ou 3 pages ».

Le matin, je suis aussi littéraire que les tortues qui gambadaient dans le jardin lorsque ma fille était petite. Écrire avant de m’être imprégnée des couleurs, des sonorités de la journée, c’est compliqué pour moi. Désormais, ma fille est grande, les tortues ont été offertes à une voisine. Je ne les trouvais pas assez littéraires. N’est pas la tortue d’Eschyle qui veut.

Nous nous trouvons au café gourmand (et charmant) à l’étage de la librairie. Une première consigne d’Hélèna pour se mettre ingambe, rédiger une brève, façon Félix Fénéon. Impertinente, ironique, en trois ou quatre lignes. On visionne quelques extraits de l’INA et à même pas dix heures du matin, nous voilà transformés en journalistes de faits divers. Je ne suis pas matinale. Je ne suis pas auditive non plus. Un peu transpirante, j’accouche péniblement de mes deux premières phrases. Qui m’auraient valu d’être licenciée sur le champ de n’importe quel journal miteux. C’est là que la bienveillance salvatrice des ateliers d’écriture prend tout son sens. Pour les brèves suivantes, je parviens à aligner quelques mots, tandis que le processus de deuil d’une potentielle carrière journalistique s’enclenche et que mon impertinence encore se planque. Mes compagnes d’atelier semblent bien plus à l’aise. Les premières minutes d’ateliers d’écriture sont une torture, il faut que je m’imprègne de quelque chose avant d’écrire, je suis diesel. En général, au bout d’une heure, mon moteur littéraire est chaud.

Les deux consignes suivantes sont ludiques et laissent plus de champ à mon art du détournement. Il y un moment où l’on sent qu’on a hameçonné l’acte d’écrire. En atelier, bon ou mauvais n’est pas la question. Il s’agit plutôt de lever les freins à l’écriture. De fluidifier la mécanique des mots. Et les mots amènent d’autres mots. Écrire, c’est sortir le fil de la pelote de laine.

Un atelier est aussi un moment d’échanges entre personnes partageant un même centre d’intérêt. Aussi le contact se crée très facilement, la pause-café nous offrant l’opportunité de raconter nos expériences respectives. Rencontrer un auteur ou une autrice dans un cadre plus intimiste qu’un salon du livre, c’est la chance de recevoir des conseils précieux et d’accéder aux coulisses. Pour ce qui relève des écrivains, je transgresse allègrement l’expression « Don’t meet your heroes » !

Dernière consigne d’Hélèna, oui déjà ! Quatre contraintes et un thème ! Dans ma tête, c’est mieux, moins tortue, plus moi. Nos stylos glissent sur la feuille, en connivence avec notre cortex. La caféine aide. Hélèna observe avec joie nos airs concentrés. On lit nos textes, on papote encore un peu et c’est la fin. Je rentre, par la route d’Éoures, comme à l’aller. Sur ma playlist, « Ain’t Nobody » de Chaka Khan.

À la maison, compte-rendu joyeux et je cherche dans la bibliothèque le roman d’Hélèna Villovitch, « Pour en finir avec mon sofa ». Ma fille dit : Ben t’aurais dû l’emmener et le faire dédicacer. J’ouvre le livre et souris. Il est déjà dédicacé : « Pour en finir avec mon sofa, mais pour commencer avec moi, chère Louise Adèle ».

Oui, commençons chère Hélèna !

Un immense merci à Hélèna Villovitch pour son grand capital sympathie, sa bienveillance, ses propositions et son enthousiasme. Et mille mercis à la librairie Les Furtifs pour l’accueil cosy et gourmand et aussi pour le café qui a sauvé mon monumental talent 😉

Crédits photo : photo de l’auteur