Le prix Goncourt… Voilà bien dix ans que je n’ai pas lu un seul roman distingué par le plus prestigieux des prix littéraires. Progressivement, je me suis d’ailleurs fortement désintéressée des prix littéraires, jusqu’à presque éviter la lecture de romans primés. À chaque rentrée littéraire, je jette un oeil à la première sélection du Goncourt, je repère mes favoris et puis… Immanquablement, le scénario itératif d’élimination de mes chouchous me laisse ce petit goût déceptif. Bref, je l’avoue, je me suis un peu lassée de ces choix convenus du jury et sans corrélation avec la qualité littéraire de l’oeuvre.

Aussi, le 3 novembre dernier, lorsque mon téléphone a bipé, me notifiant que le romancier sénégalais Mohamed Mbougar Sarr avait remporté le prix Goncourt avec son quatrième roman « La plus secrète mémoire des hommes », j’ai sorti la tête de mon vaisseau fantôme des prix littéraires, je me suis recoiffée et me suis dit : Allons donc voir ce qu’il se passe du côté du restaurant Drouant et des éditions Philippe Rey, la maison indépendante qui publie le roman primé ! Oui cette année je suis totalement séduite et en voici, parmi d’autres, sept raisons :

• Le Monde qualifie « La plus secrète mémoire des hommes » de roman cérébral. C’est déjà largement suffisant pour me convaincre.
  
• Les éditions Philippe Rey, c’est une petite maison indépendante. Actionner les leviers pour influencer le vote, ce n’est assurément pas dans ses moyens. Tandis que l’intégrité littéraire hors logique capitalistique est un leitmotiv. I’m in !
  
• J’ai écouté plusieurs entretiens de Mohamed Mbougar Sarr. Outre une élocution et une construction de pensée très classe auxquelles je suis réceptive, il a notamment dit ceci lors d’une interview à Brut :

 » Les grands livres dépassent toujours ce qu’ils semblent dire. Et c’est pour ça qu’ils sont grands. C’est plus profond, c’est dans le ventre que ça se sent ça. »

• La critique avait largement repéré le talentueux Mohamed Mbougar Sarr et le bouche à oreille avait déjà commencé à tisser sa toile bien avant Halloween dans les chaumières livresques.
  
• Mohamed Mbougar Sarr vit dans l’Oise et pas aux Deux Magots, soit loin des sphères germano-pratines endogènes. Pour lui, le seul continent qui vaille pour les écrivains, c’est le continent Littérature.
  
• Ce Goncourt 2021 est un signal fort à l’espace francophone, à tous les écrivains du continent africain et d’ailleurs. La langue française est possédée par des millions de personnes dans le monde, ce millésime nous le rappelle et déforme positivement la figure hexagonale du français.
  
• J’était d’humeur sélective et exigeante pour cette rentrée littéraire, il semblerait que je ne sois pas l’unique. C’est un peu dans l’air, ou dans l’inconscient collectif. Assurément, « La plus secrète mémoire des hommes » et son auteur s’inscrivent pleinement dans ma disposition d’esprit du moment !
  

À vous de me dire si vous êtes séduits !