Billet d’humeur, Soliloque

Ma toute première lecture de cette rentrée littéraire fut déceptive. Une oeuvre dont je n’ai d’ailleurs parlé nulle part. Ce roman quasi adulé sur Insta, enchainant les clichés, aux personnages prédictibles et à la B.O. encore plus cliché que ses scènes niaises, je me suis dit « Mais qu’est-ce qu’il fout dans la Blanche de Gallimard ? » Est-ce que je vais continuer à claquer vingt euros pour des romans qui ne resteront pas dans ma bibliothèque et encore moins dans mon paysage mental ? Une réflexion s’est enclenchée sur ce que j’allais faire de cette rentrée et surtout ce que j’allais lire. Ma sélection de la saison est un peu différente, un peu plus exigeante. Une liste pas très bling bling ni likable.

Cette réflexion personnelle fut exacerbée lorsqu’il y deux semaines, je lus « Cantique de la critique » d’Arnaud Viviant, un texte qui n’épargne pas les blogueurs, même si ce thème n’est qu’un objet périphérique de l’ouvrage. Non pas que je me sois vexée, d’autant que je ne puis me qualifier officiellement de blogueuse, encore moins d’influenceuse. Non. Plutôt que de questionner l’influence des blogueurs, je me suis surtout demandé quelle était l’influence de mon activité de blogueuse sur mon comportement de lectrice. En d’autres termes, à quel point cette activité a-t-elle modifié mon comportement de grande lectrice que je fus ? Comment, par exemple, concilier la lecture d’Ulysse de Joyce, ou de À la Recherche du temps perdu de Proust avec ma curiosité de fashionista littéraire, sachant qu’au moins la moitié de mes lectures de rentrée littéraire sont déceptives ? Comment satisfaire mon envie de publier régulièrement des billets littéraires tout en décidant de relire l’intégralité des romans de Philip Roth ou de Samuel Beckett ? Il y a quelques années, la question ne se posait pas. Je lisais sans préméditation.

J’ai atteint cette semaine un troisième niveau de réflexion après ma lecture de Plasmas de Céline Minard. Ce roman qui remet en question la souveraineté de l’humain faisait partie de ma sélection de la rentrée littéraire. Une lecture exigeante et assez déroutante, mais n’était-ce pas là précisément ce que j’attendais ? Je dois l’avouer, je suis restée un peu extérieure à cette lecture au vocabulaire technique trop hermétique pour mon esprit peu scientifique. Il fallait se laisser bercer par le style et le signifiant, ne pas chercher à tout comprendre. Pourtant dans ma déroute, j’ai senti un talent, une proposition littéraire insolite, un objet littéraire qui certes m’a laissée sur le bas côté, mais avec regret. Le regret de ne pas avoir su rester en selle, et celui encore plus fort d’être incapable de mettre en avant cette littérature que précisément j’aimerais défendre. Il y a un paradoxe dans ce genre d’expérience. Celui de se sentir désorientée, tout en étant envahi par cette empreinte particulière laissée par le roman, ce qui en fait un objet littéraire et le distingue d’une simple lecture.

Oui, Arnaud Viviant, vous avez raison, je soliloque.

Et vous ? Qu’en pensez-vous ? Le bling ou la littérature ?