Je t’aime moi non plus
La vie est un vaste théâtre et les réseaux sociaux sont devenus à la vie ce que l’androïde est à l’humain, une tentative de succédané, artificiel et sans fonction cognitive ni autonomie. Un quasi néant dans lequel on se plonge plus ou moins quotidiennement, d’un simple coup de pouce qui scrolle, les baby boomers étant reconnaissables en ce qu’ils privilégient plutôt l’usage rigide de l’index… Et comme dans la vraie vie, la pièce de théâtre des réseaux se déploie pour le meilleur et pour le pire. Le pire étant qu’à force de déplacer sa vie dans les algorithmes, on finit parfois par souffrir de cybercinétose et par souhaiter se désintoxiquer de ce néant habillé de lumière bleue. Le meilleur étant lorsque ce vaste théâtre se met au service du partage de passions communes et d’échanges où un peu comme au Procope, seul l’esprit tient lieu de carton d’invitation.
Les érudits
Depuis quelques semaines, je prête une attention plus particulière aux publications de La Cause Littéraire. Je l’avoue, je me sens complètement ignare en lisant leurs recensions qualitatives et référencées, mais que voulez-vous, on est toujours le con de quelqu’un. Et puis, un peu lassée de mes lectures souvent déceptives de rentrées littéraires, j’ai décidé que leur exigence un brin austère me conviendrait parfaitement pour quelques temps. Quand je parlais du meilleur, c’est ici !
Le mur des larmes
On a beaucoup pleuré ces dernières semaines. Le temps des idoles n’est plus, les derniers des Mohicans nous quittent les uns après les autres, Charlie Watts, Jean-Paul Belmondo, nous laissant orphelins non seulement d’eux, mais des symboles d’une époque qu’on fantasme quand on n’est pas assez âgé pour l’avoir vécue. Il y avait beaucoup de larmes sur mon mur.
Dans un autre style, plus comique, les déclarations sentencieuses de ceux qui décident de quitter le bateau des réseaux, nous expliquant en détail leur déception de ne pas être assez likés. Traduisez ne pas être aimés. Mon coeur oscille entre empathie et ironie. Evidemment, dans mon observation de ce charmant petit monde virtuel, j’ai pu noter combien certains posts étaient plus rentables que d’autres. Si on souhaite adopter le diktat de rentabilité en vigueur dans la vraie vie, il convient préférentiellement d’opter pour une ligne éditoriale comique. Si vous savez dessiner, le Comic Strip est un petit Graal. Sur mon fil, j’ai pu relever un certain engouement pour mes Coffee time ironiques, tandis que ma chronique de rentrée littéraire érudite a remporté deux ou trois likes un peu désolés… Eh oui, viens dans mon comic strip !
Ange ou démon ?
Sur Facebook, il y a ces petits jeux qu’on s’amuse à faire quand, après une journée de boulot pleine de contrariétés, on atteint le promontoire du déclin cérébral. Aujourd’hui, j’ai joué à « Es-tu plutôt un Ange ou un Démon ? ». Après trois tentatives intempestives, rien à faire, le truc s’obstinait à me répondre 99 % Ange. Mais c’est pas possible ça ! Je chante dans un groupe de rock moi ! J’ai un rôle à tenir moi ! C’est quoi ces conneries d’ange ! Qu’on appelle Orphée fissa ! Qu’on appelle Mister Hyde !
L’autre soir, avec un ami. Dans son jardin. Quelques gouttes de pluie. Chouette discussion, tous les deux allongés sur les transats, nous buvons un verre de vin. Il me dit « Ça n’agace pas un peu les gens, ton côté intello ? » … Personne ne me demande si ça ne m’agace pas d’être toujours toute seule à aimer les films de Michelangelo Antonioni.
Et avec tout ça, on ne sait toujours pas qui est Banksy !