C’est la rentrée littéraire ! Et tout comme Molière pour son Dom Juan, je trouve que les commencements ont des charmes inexprimables. Qualifiez-moi donc de fashionista littéraire, je vous rétorquerai que l’arrivée en librairie des 511 romans et récits de la rentrée littéraire 2020 a sur ma personne un effet bénéfique et provoque un certain regain de vitalité ! Tel Dom Juan en quête de la femme idéale, ou le jeune enfant et son tout nouveau cartable de rentrée scolaire, je reprends le chemin vers les libraires indépendantes, légère, désirante de mots et habitée d’un enthousiasme défricheur, faisant et rallongeant ma liste de souhaits, au gré de mes envies.
Tout ça pour vous dire que … choisir, pour cette rentrée, ça va être compliqué !
Du côté des éditions de Minuit
Amour inconditionel pour leur catalogue. Comme toujours, j’achète les yeux fermés et ne regrette jamais. Cela faisait quelques années que je n’avais rien lu de Laurent Mauvignier. Histoires de la nuit, son nouveau roman de plus de 600 pages, qualifié de très noir et hypnotique ne reçoit que des éloges et m’invite déjà à quelques nuits blanches.
Dans Les émotions de Jean-Philippe Toussaint, on retrouvera le narrateur de la Commission européenne de son roman précédent La clé USB. Les émotions, rien que le titre, c’est déjà implicitement un roman. On notera que c’est précisément le substantif qui clot La clé USB… Comme l’indique la quatrième de couverture, Le moment est donc venu de dire un mot de la vie privée de Jean Detrez.
Les auteurs que je vais découvrir
On a beau lire, on a beau être curieux, il y a toujours l’auteur, même connu, dont on n’a encore rien lu. Pour cette saison, et sous l’influence de l’émission « Le masque et la plume » sur France Inter, je tenterai d’y remédier pour quelques uns, notamment Eric Reinhardt et son Comédies françaises (Gallimard) parce qu’il semblerait qu’en le lisant, je vais apprendre un tas de choses sur la naissance d’Internet
et Simon Liberati, le chouchou de Frédéric Beigbeder qui publie Les démons (Stock). Cher Frédéric, vous avez réussi à éveiller ma curiosité car si on me raconte Truman Capote, Andy Warhol et tout un tas d’autres références culturelles dans un décor châtelain façon Vampire Diaries, je fais quoi ? J’enfile une robe de bal et j’arrive !
De l’autre côté de l’Atlantique
Je ne peux pas faire l’impasse sur ces oeuvres : Nickel Boys (Albin Michel) de Colson Whitehead, écrivain américain qui a obtenu deux fois le prix Pulitzer ! En 2017 pour Underground Railroad et en 2020 pour Nickel Boys, exploration de la blessure raciale de l’Amérique.
La Découverte publie une pièce de théâtre inédite de James Baldwin, Blues pour l’homme blanc, inspirée par le meurtre d’un adolescent, jeune noir de 14 ans en 1955. L’Amérique de 1955, celle de 2020 et de George Floyd, la même rage.
Mes chouchous !
J’avais découvert l’an dernier Alexandre Labruffe et ses Chroniques d’une station-service, un roman drôle, sans prétention et sympathique, aux personnages loufoques. L’auteur revient avec Un hiver à Wuhan (Verticales), un récit fragmenté sur les séjours de l’auteur dans cette ville à la notoriété virale si je puis dire, de 1996 à l’automne 2019. L’auteur semble avoir gardé sa veine humoristique et je m’en réjouis. Ce court récit est sélectionné pour le Prix de Flore.
Made in Marseille ! Là encore, comment faire l’impasse quand on habite la région marseillaise et qu’Hadrien Bels, primo-romancier, nous raconte dans Cinq dans tes yeux (L’Iconoclaste) le quartier populaire du Panier à Marseille, des années 90 à sa gentrification actuelle.
Une écriture néo-proustienne, ça vous tente ? Eric Laurrent, ex-auteur Minuit a rejoint les Éditions Flammarion avec Une fille de rêve. La starlette des années 80 Nicky Soxy dont l’enfance nous avait été contée dans son opus précédent Un beau début, roman que j’avais adoré, est à nouveau sous les projecteurs de l’auteur à l’écriture maniériste. Nightclubbing dans Paris, quête de notoriété à tout prix, alimentée par les chroniqueurs mondains, 240 pages tragiques mais ultra stylées. Bientôt, je vous en reparlerai !
Où sont les femmes ?
On en parle beaucoup, je l’ai sélectionné, encore une fois, sous l’influence du « Masque et la plume » : Chavirer (Actes Sud) de Lola Lafon. Le destin de Cléo, une jeune fille de treize ans à l’existence modeste et à qui une mystérieuse Fondation proposera de réaliser son rêve, devenir danseuse. Un piège, et en 2019 un fichier de photos retrouvées sur le net. C’est ici le talent de romancière de Lola Lafon que j’ai très envie de découvrir.
Ottessa Moshfegh la nihiliste, c’était Mon année de repos et de détente en 2019, une lecture atypique et insolente que j’avais aimée, mais qui présentait à mon goût quelques longueurs dans sa deuxième moitié. Nostalgie d’un autre monde (Fayard) est un recueil de nouvelles dont le point commun des héros est qu’ils ont pris le mauvais virage. Nihiliste, vous disais-je ?
Pour clore cette sélection, un texte inédit de Simone de Beauvoir, Les inséparables, sera disponible aux éditions de l’Herne à partir du 7 octobre ! Les inséparables, ce ne seront pas Sartre et Beauvoir, mais Simone de Beauvoir et Zaza (Andrée dans le livre), l’amie chère décédée à 21 ans, dont l’absence marquera l’écrivaine. On a déjà envie de relire Mémoires d’une jeune fille rangée pour se mettre en condition.
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Il y aura sans doute d’autres envies, d’autres découvertes, d’autres lectures et je vous en reparlerai plus en détail pour certaines ! Il fallait choisir, j’aimerais en rajouter, mais dans ce cas, cela ne serait plus une sélection. C’était juste mes envies, mes amours, ma rentrée littéraire !