C’était il y a déjà plus de quinze jours, pas de parapluie dans ma valise. Le temps s’annonçait splendide et ce fut tant mieux car durant cet atelier d’écriture parisien organisé par Les Mots, nous allions nous promener dans les rues, les cafés, les parcs et les squares, en quête d’une « proie » élue sans qu’elle sans doute, sans qu’elle devine qu’elle allait devenir le personnage d’un croquis littéraire, personnage volé dont nous allions inventer la vie, l’histoire, les déboires ou les succès, dans ce décor parisien qui nous était posé.
Arnaud Cathrine
La proposition du thème de l’atelier « L’art du croquis, écrire des passants » s’inspirait fortement de la forme proposée par le dernier ouvrage de l’animateur de l’atelier et écrivain Arnaud Cathrine, intitulé « J’entends des regards que vous croyez muets » et publié aux éditions Verticales cette année. L’écrivain s’était promené avec des carnets de notes devenus en quelque sorte un journal du dehors. Tous les jours, il cherchait son personnage dans les lieux publics et écrivait le « désir de son regard ». Pourquoi je choisis telle personne, pourquoi ce visage m’intéresse-t’il, que vais-je dire ? Telles étaient ses interrogations devenues nôtres pour ces deux jours d’entrainement à cet exercice du croquis.
Les exercices
Subjectivité minimale et neutralité. Telle était la consigne de ce premier exercice en extérieur. Pour mon premier croquis, je me suis installée en toute banalité à la terrasse d’un café parisien, espérant combiner ainsi la trouvaille du personnage de mon récit et la dégustation d’un bon café sur une terrasse ensoleillée. Après la restitution des textes, ce fut déjà l’heure du déjeuner, une jeune participante, Ines, me questionne Vous déjeunez par ici ? On mange ensemble ? Oui ! Joyeux papotage sur une terrasse ensoleilée. On se tutoie.
À partir du deuxième exercice, le « Je » s’autorisait une entrée en scène. Il s’agissait d’aller vers l’autre tout en interrogeant explicitement notre propre regard. Je m’installai cette fois-ci dans un square. Le temps magnifique contribuait à la joyeuseté ambiante du lieu. Mon jeune voisin de banc ne se doutait pas qu’il devenait le personnage d’un croquis littéraire.
Le lendemain matin, nouvelle consigne : Partir en binôme, choisir une proie commune aux deux, chacun rédigeant quatre ou cinq lignes de description, puis inventant la vie du personnage. Je fais équipe avec Paul. Il me propose un repérage sur les marches au pied du Panthéon, je le suis, nous partons dans la fraicheur matinale et trouvons rapidement notre personnage niché dans un groupe de touristes effectuant une visite guidée. L’exercice ne fut pas simple, laisser aller sa plume dans son premier jet n’est pas toujours chose aisée. Il fut, à la lecture, amusant et intéressant de découvrir de grandes similitudes dans les deux textes et dans ce qu’ils évoquaient sur un même personnage choisi.
La météo nous était toujours ultra favorable, je n’en revenais pas de cette ambiance estivale imprégnée de légèreté parisienne, si tard dans la saison. Pour la dernière consigne, nous prîmes nos quartiers aux Jardin du Luxembourg, … le Luco pour les intimes. Une part du processus favorisant l’écriture est l’entrainement, et j’eus moins de difficulté, moins de freins, à remplir les pages de mon carnet pour ce dernier exercice. Après deux jours d’écriture en plein air dans le Paris du quartier latin, passés à déambuler carnet à la main, lunettes de soleil sur le nez, je me sentais en phase avec moi-même, alignée. Sous les arbres du Jardin du Luxembourg, assise sur l’une de ces chaises métalliques vertes au nom éponyme, je devenais une croqueuse littéraire.
J’adresse un grand merci à Arnaud Cathrine pour sa disponibilité et les conseils personnalisés qu’il a eu la gentillesse de me donner pour mon prochain projet. Je remercie bien évidemment la sympathique équipe des Mots !
Stage Les Mots « L’art du croquis : écrire des passants » avec Arnaud Cathrine.
Photo : Paul Renier