Melankholia

Humeur du mot emprunté au latin « melancholia », et plus anciennement du grec « melankholia », étymologiquement la bile noire, elle guette nombre d’entre nous, notamment lorsque la saison décline, que la lumière solaire se fait plus rare, que l’injonction de bonheur des fêtes de fin d’année nous oppresse et que le découpage calendaire grégorien nous déclare qu’un cycle se termine.

Dans la pensée antique, la mélancolie était considérée comme une source de génie et de folie, associée à un sentiment profond de tristesse. Notre époque a réduit la mélancolie à une pathologie, la dépression. Vecteur de fertilité, de lucidité et de clairvoyance, mais aussi de désespoir, la bile noire fut associée à la marque créatrice du génie. Charles Baudelaire en est une des grandes figures, Spleen devenant le mot des poètes. « Melancholia », film de Lars Von Trier, revient sur le sens ancien du terme. Dans « L’Encre de la mélancolie », Jean Starobinski propose « une forme de mise à distance de la conscience face au désenchantement du monde ».

D’une manière moins intellectualisée, je vois dans la mélancolie des Anciens, cet état de lucidité qui fait que l’on ressent tout ce qui nous sépare de notre idéal. En quelque sorte une activité cérébrale intense et excédentaire qui tournerait à vide, faute d’exutoire…

Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
Et que de l’horizon embrassant tout le cercle
Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits;
Baudelaire